Présentée par le Laboratoire NT2
S’éclipser | Phases of Resilience
Exposition
Avec Elisa Gleize, Joselyn McDonald & Sarah Friend
Du 6 novembre 2020 au 6 février 2021
http://seclipser.org/
Lancée le 6 novembre 2020, dès 11h37 lorsque le soleil est à son zenith.
S’éclipser | Phases of Resilience, présentée dans le cadre du festival HTMlles, reprend le motif de la métamorphose dans une perspective technocritique et écoféministe. Les trois œuvres réunies donnent à voir des créatures hybrides, proposent des transformations ou des déformations et invitent ainsi à imaginer de nouvelles configurations matérielles et symboliques pour notre présent précaire.
Ces métamorphoses agissent comme des écrans qui réfléchissent tout autant qu’ils protègent; elles reposent sur le principe d’une disparition nécessaire à la (re)poétisation du monde, un retrait calculé qui laisse place à d’autres agentivités résilientes.
Dans Mex et les animaux d’Elisa Gleize, Mother_Protect_Me de Joselyn McDonald et Becoming Illegible de Sarah Friend, la simulation, la distorsion et l’abstraction sont autant d’opérations qui interrogent ou mettent à mal le sujet humain universel, son image, ainsi que les systèmes androcentrique et anthropocentrique qui le soutiennent. Les œuvres ouvrent des espaces de vie, d’espoir et d’opposition et elles reflètent, comme dans un miroir déformant, la fragilité du monde et de ses structures en vue d’inspirer de subtiles insoumissions.
S’éclipser | Phases of Resilience est synchronisée avec les heures d’ensoleillement de la ville de Montréal. Le site web de l’exposition est hébergé sur un Raspberry Pi d’une capacité de 8 Go. La visibilité des œuvres et l’accès à l’exposition sont dès lors arrimés aux conditions climatiques ambiantes et soumis à ces restrictions technologiques afin de réduire de manière conséquente son empreinte écologique.
Joselyn McDonald, Mother_Protect_Me, 2020
L’œuvre Mother_Protect_Me consiste en une série de vidéos montrant l’artiste qui se couvre le visage de fleurs pour se soustraire aux systèmes de reconnaissance faciale. Joselyn McDonald compose des arrangements d’iris, de chrysanthèmes ou de gypsophiles dans un style rappelant la pratique traditionnellement «féminine» dont elle s’inspire, à savoir les tutoriels de maquillage. À la fois séduisants et saugrenus, ces masques appellent à déjouer les algorithmes de détection et à reprendre le contrôle de son image. L’œuvre a recours aux pouvoirs camouflant de Mère Nature pour résister à la surveillance de masse et nous invite à faire de même.
Elisa Gleize, Mex and the animals, 2020
L’œuvre vidéo Mex and the animals prend place dans un futur post-apocalyptique mis en scène dans Second Life. Né dans un monde sans animaux, l’avatar Mex narre sa quête mélancolique d’une faune disparue en contemplant des simulacres réducteurs et échangeables comme de vulgaires marchandises. Au cours de sa déambulation dans ce métavers, le personnage rencontre des créatures fantastiques incarnées par d’autres utilisateur·rices. Mex et les animaux, loin d’être un conte classique pour enfant — comme son titre l’évoque par ailleurs —, témoigne d’un futur tourné vers le passé où l’imaginaire pallie les carences du réel. Œuvre élégiaque, la dystopie de Mex et de ses contemporain·es fait écho à l’impact psychologique de la détérioration de l’environnement qui nous accable au présent.
Sarah Friend, Becoming Illegible, 2020
Becoming Illegible porte à réfléchir aux conditions de lisibilité et de visibilité du visage, du sujet et de la société. Les vidéos produites par Sarah Friend à l’aide de filtres — qui permettent d’apposer des effets sur les images pour les modifier — donnent lieu à des représentations abstraites où la nature et l’humain fusionnent jusqu’à devenir indiscernables, étranges. Ce processus de déformation est ralenti et mis en évidence au fil des vidéos. Métaphore de la médiation technologique, l’artiste invite également les utilisateur·rices à interagir avec l’œuvre en cliquant sur l’icône de l’appareil photo, renversant ainsi leur point de vue: d’observateur·rices à cibles de l’objectif. Becoming Illegible matérialise les tensions et les distorsions de nos rapports avec la nature en plus d’incarner une stratégie de résistance à l’injonction d’être vu et surveillé.
L’artiste tient à remercier Max Bittker pour son travail sur shaderbooth, un environnement de montage «open source» pour l’écriture et le partage d’«œuvres-filtres» (https://shaderbooth.com/).
Exposition réalisée par le Laboratoire NT2 en collaboration avec le groupe de recherche Archiver le présent et soutenue par la Chaire de recherche du Canada sur les arts et les littératures numériques. Avec la participation de Cédric Anderson, Gina Cortopassi, Ludovic Doutre-Guay, Joanne Lalonde, Alexandra Martin et Lisa Tronca.
Image : Laboratoire NT2, S’éclipser: Phases of Resilience, page d’accueil de l’exposition aux heures de grand ensoleillement, Montréal, 2020